Venus Coca

Cette performance touche à des sujets que l’on ne peut plus « traiter » ou aborder sans un accompagnement. Les mouvements involontaires ou « réaction autonome du système nerveux » sont, ici, une matière esthétique et rythmique. Or ils peuvent faire ressurgir des traumas, ou évoquer des maladies neuro-dégénératives, qui sont taboo dans notre société. Comment pourrait-on ensemble préparer le public à aborder ces sujets, en les visibilisant et en les mettant en valeur? En effet, il est important de montrer une monstruosité nécessaire à notre quotidien ou à notre santé ; que l’on se réhabitue à voir des corps, trembler ou convulser sans que l’on est l’impression d’être possédé. Une femme qui tremble (ou qui s’étire en déroulant ces fascias) n’a pas forcement une crise d’hystérie ; elle danse peut-être en conscience.


PRESS.

Pôle 164 

Avec les conseils de Steven Cohen à Impulstanz,Vienne, Autriche en 2023

Garage 29 

Cette création entre danse et performance, part de rencontre magique et de Pensée sauvage*.

J’entame cette recherche lors du programme à IMPULSTANZ à Vienne, guidée par des Mentors féministes et imprégnés de pensée décoloniale, et sous l’influence des méthodes anarchistes. 

Le principe de départ était de s’appuyer sur un savoir chaud**, soit expérientiel, en commençant par le mouvement ; une personne seule dans un studio.

Bien qu’un studio de danse soit neutre, la localité du début de cette création à fait surface de manière inattendue. En présentant une étape de travail à Steven Cohen, un de mes ancêtre (Sacher-Masoch) est apparu sous la forme d’une figure connue, La Vénus à la fourrure***.

En parallèle, je continuais à développer une qualité de corps composée de mouvement involontaire grâce à la méthode TRE (Traumatic Release Exercice****) et aux effets secondaires de médicamenteux. Cette qualité de corps a donné vie à la figure de la Venus dans un développement entre monstruosité, animalité et mythologie.

Pour écrire une dramaturgie authentique, j’y ai ajouté une tâche impossible ; celle de danser avec mon accessoire préféré (un couteau) dans le vagin.

Note d’intention

Objectif

Raconter une histoire personnelle et collective, d’une manière féministe et une pensée décoloniale. 

Buts

Montrer sur scène d’autres types de personnalités qui ne correspondent ni au stéréotype de la masculinité conquérante ni à celui de la fragilité féminine. 

Solution

Il s’agit donc ici de se déposséder ou de montrer qu’il est possible de gérer/composer ses hypersensibilités ou traumas. Autrement dit, je travaille à chorégraphier des mouvements involontaires ; dialoguer avec mon système « autonome ». Pour ce faire, je me nourris de la théorie de Fictions-panier et de la lecture de Ursula K. Le Guin, Les dépossédées.

*La Pensée sauvage est un essai de Claude Lévi-Strauss publié pour la première fois en 1962 chez Plon. ** Les savoirs froids sont les savoirs scientifiques, les savoirs chauds désignent ce que sait un individu à travers ses expériences de vie ***La Vénus à la fourrure (titre original : Venus im Pelz) est un roman érotique de Leopold von Sacher-Masoch paru en 1870. **** la méthode TRE a été Développée aux Etats-Unis par le Dr David Berceli suite à son expérience dans des zones de conflits armés.

Alessia wyss / En archipel

Système autonome: Système d’écriture chorégraphique 

Le système autonome est un système d’écriture chorégraphique. Il fonctionne comme le système nerveux autonome; contrôlant les mouvements involontaires de notre corps. Le dispositif développe des mouvements qui échappent à la volonté consciente. De la même manière que des groupes autonomes, tels que les anarchistes, les féministes et les situationnistes, créent des systèmes indépendants et alternatifs, je m’inspire de cette approche pour développer une chorégraphie qui valorise les mouvements involontaires et les interactions spontanées.

Ce système d’écriture chorégraphique comporte des parcours précis, des gestes spécifiques, et des relations définies entre les danseurs, la musique et le rythme. Il s’installe dans un cadre structurel pour devenir une recette ou des outils permettant aux danseurs d’improviser. Ainsi, bien que les mouvements soient improvisés, ils sont néanmoins ancrés dans un système d’interconnectivité entre les éléments scéniques.

Chorégraphier des mouvements involontaires pose un défi comme celui de l’organisation des groupes anarchistes par exemple. Il s’agit de créer des systèmes autonomes permettant aux danseurs de s’exprimer librement tout en faisant partie d’un système cohérent. Ces systèmes valorisent les corps fragiles et non normés, souvent cachés par la société. En rendant visibles ces mouvements involontaires, comme ceux observés dans des maladies neurodégénératives, nous valorisons ce que la société tend à marginaliser et à ignorer.

Mon travail chorégraphique cherche à mettre en lumière et à valoriser l’importance des mouvements involontaires et des corps fragiles. En montrant des corps qui ne correspondent pas aux normes sociales de force et de contrôle, j’ouvre un espace pour la vulnérabilité et la diversité corporelle. Ces mouvements, souvent perçus comme bizarres ou non conventionnels, sont essentiels pour comprendre la richesse et la complexité de l’expérience humaine. Je valorise les mouvements involontaires et les corps fragiles, montrant que ce qui est souvent caché ou marginalisé par la société peut devenir une source de créativité et d’inspiration.

Lors des trainings, j’active des réflexes, en utilisant des exercices du TRE, pour encourager les mouvements involontaires. Ces sessions d’entraînement ne sont pas simplement des exercices techniques, mais des moments où les performeur.euse.s apprennent à libérer leur corps des contraintes de la volonté consciente. Iels apprennent à répondre instinctivement aux stimuli, à accepter l’imprévisibilité, et à trouver de la beauté dans ce qui est souvent considéré comme chaotique ou non conventionnel.

Particularités logistique et éthique

Une étroite collaboration avec les lieux partenaires est nécessaire pour les points suivant:

  • Un espace à mixité choisi. Comment cela résonne chez vous? Comment pourrait-on envisager cela dans des espaces qui ne le tolèrent pas? Y a-t-il des espaces non-mixtes plus convenables que d’autres? Mon souci est de créer un espace qui soit propice à inviter des spectatrices qui n’ont pas l’habitude d’aller voir de la danse contemporaine, sans polir ni policier mon esthétique. Sur quel territoire peut-on envisager cela? Dans un hammam en périphérie d’une grande ville, par exemple? Dans quel lieu, le public peut-il être aussi nue sans que cela ne semble étrange ou lubrique?
  • Cette performance touche à des sujets que l’on ne peut plus « traiter » ou aborder sans un accompagnement. Les mouvements involontaires ou « réaction autonome du système nerveux » sont pour moi une matière esthétique et rythmique. Or ils peuvent faire ressurgir des traumas, ou évoquer des maladies neuro-dégénératives, qui sont tabou dans notre société. Comment pourrait-on ensemble préparer le public à aborder ces sujets, en les visualisant et en les mettant en valeur? En effet, il est important pour moi de montrer une monstruosité nécessaire à notre quotidien ; que l’on se réhabitue à voir des corps, trembler ou convulser sans que l’on est l’impression d’être possédé.

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